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Rechercher : esclavage

  • CALAIS : TOUT ETRE HUMAIN EST EN SITUATION REGULIERE SUR TOUTE LA PLANETE

    Calais : Les afghans fuient les armes de nos militaires pour retrouver celles de nos policiers

    30 septembre 2009

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    Après avoir fermé Sangatte et déplacé le désespoir dans la rue, la France continue à peaufiner son image médiatique de grande humanité avec un Ministre parti un matin à la chasse aux Migrants et un Maire qui claironne « Pas de ça chez nous !! ». Du déjà vu qui ne sent pas très bon.

    Nous refusons que Le Migrant soit traité comme un animal au sein d’un vaste cheptel démographique et économique dans lequel la France et les autres pays européens pourraient se servir suivant leurs besoins !

    Le Migrant est un être humain qui fuit la guerre, les conflits, la misère de son pays, dans lequel, la France a d’ailleurs bien souvent une influence néfaste : colonialisme économique, esclavage moderne dans les mines en Afrique, sauvetage des droits humains en Afghanistan, vente d’armes et de centrales nucléaires un peu partout, etc.

    Assez d’hypocrisie ! l’Europe ne sera jamais ce soi-disant « espace de liberté, de sécurité et de justice »… tant que les droits des êtres humains qui y vivent, la visitent ne seront pas les mêmes pour tous. Aujourd'hui un sans papier sur deux ne se soigne pas. Il est monstrueux de refuser tout droit à des êtres humains, cela revient à nier leur existence, engendre violences, souffrances, et favorise très concrètement les filières mafieuses et terroristes de tout poil.

    Un gouvernement responsable a aussi des devoirs : la France, mère de la déclaration des droits humains, doit retrouver sa dignité et prendre ses responsabilités au sein de l’Europe :

    Oui à une coopération internationale solidaire sans ingérence mercantile ni militaire.

    Oui à une charte des droits fondamentaux applicable à tous, européens ou non, migrants de toutes origines, de toutes cultures.

    Pour une société non violente digne de l’être humain, nous appelons toutes les personnes à se joindre à la Marche Mondiale pour la paix et la non violence du 2 octobre 2009 au 2 janvier 2010.

    Rendez-vous le 2 octobre à 19h00 parvis du Trocadero.

    Pour le Parti Humaniste France

    René Oster

  • PRESENTATION DU LIVRE DE LA MARCHE MONDIALE - TOLEDE

    LIVRE DE LA MM.jpghttp://worldpeace.hautetfort.com/archive/2010/09/30/le-livre-de-la-marche-mondiale-pour-la-paix-et-la-non-violen.html

    POUR COMMANDER LE LIVRE ET LE DVD

    http://shop.theworldmarch.org/index.php?dispatch=products.view&product_id=1&sl=FR

     

    1ER OCTOBRE 2010

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    20101001 Présentation du livre de la Marche Mondiale - Tolède.doc

    Un an après le point de départ de la Marche Mondiale en Nouvelle-Zélande, on a présenté à Tolède (Espagne) le livre de la Marche Mondiale pour la Paix et la Non-Violence, une compilation à 400 pages en couleur et la presque totalité de ce qui a été fait durant trois mois, plus les préparatifs. Discours de Tony Robinson, Porte-parole International de Monde Sans Guerres et Sans Violence.

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    2.jpgPrésentation du livre de la Marche Mondiale - Tolède

    C’est aujourd'hui le cent quarante et unième anniversaire de Mahatma Gandhi, la 4eme fois que les Nations Unies observent la Journée Internationale de la Non-violence et cela fait un an que débutait à Wellington (Nouvelle Zélande), la Marche Mondiale pour la Paix et la Non-violence.

    En ce moment il y a précisément un an que les membres de l'équipe de base de la Marche Mondiale nous nous étions déjà réveillés d'un rêve très bizarre dans lequel une cinquantaine d’entre nous, nous dormions sur des matelas avec bien peu de couvertures pour nous tenir au chaud, en nous demandant comment nous allions survivre jusqu'au jour 93, si ça c’était seulement le premier jour !

    Durant les trois prochains mois, tous les membres de l'équipe de base qui ont voyagé, se souviendront sans doute, en feuilletant ce livre dans des moments de tranquillité " Quoi ! Il y a déjà un an qu’on faisait cette chose incroyable dans ce pays-là. On dirait que c’était il y a 10 ans ! "

    L'an passé, la Marche Mondiale a constituée un apport énorme pour la prise de conscience des dangers des armes nucléaires, et cela dans la période préalable à la conférence de révision du Traité de non-prolifération (TNP) à New York. A cet effort, se sont ajoutés des milliers d'organisations du monde entier, grandes et petites, démontrant ainsi que cette demande n'est pas une question de minorités, mais est le désir pressant de la population mondiale.

    Évidemment, les 10 dirigeants mondiaux qui contrôlent les armes nucléaires ont choisi de ne pas nous écouter et la conférence du TNP a été de nouveau une déception pour les groupes antinucléaires. Toutefois, notre Marche a été un succès pour la bonne et simple raison qu’elle nous a donnée la possibilité de créer des liens entre des millions de jeunes du monde entier. Nous les avons ainsi aidé à se connecter avec leurs idéaux.

    Nous nous trouvons maintenant dans une situation où ce dont nous avons besoin, c’est un mouvement social ample capable de connecter de nouveau avec les jeunes et capable de changer la direction dans laquelle s’oriente le monde. Pour cela, une force renouvelée dans Monde sans Guerres est nécessaire parce qu’il est de notre tâche de contribuer à la création de ce mouvement social.

    Mais, comment créer ce mouvement social ? Ce qu’il nous faut, c’est rassembler les pièces du casse-tête. Il faut montrer comment le système économique mondial est en rapport avec l'industrie de l'armement, mettre en évidence son rapport avec les banques, les conséquences sur la pauvreté, le changement climatique, comment cela implique les abus des droits humains, mettre cela en relation avec les guerres, avec les gouvernements, avec les médias, comment cela affecte mon travail (ou mon manque de travail) et, surtout les difficultés que j'ai à la maison ou avec mes amis ou avec mes enfants et mes parents et même celles que j'ai avec moi même, mon esprit et mon corps.  Parce que le fait est que tout est lié, et si tout le monde pouvait voir cette connexion, ce mouvement dont on parle existerait déjà.

    Le mouvement que nous créons a une direction et un destin au-delà de l'horizon immédiat, et nous ne sommes pas les seuls à nous diriger vers là.
    Nous pouvons dire aux environnementalistes, aux activistes antinucléaires, aux activistes des droits humains, aux groupes de lutte contre la pauvreté, aux gens spirituels et à beaucoup d'autres, " Oui, nous allons aussi dans cette direction. Allons-y tous ensemble ! "

    Il y a des siècles les Européens croyaient que le monde était plat et Christophe Colomb est arrivé et a dit : " Non, il n'est pas plat, il est rond. Nous allons vers l'Inde en direction ouest ". Il y a quelques siècles, de nouveau en Europe, on avait instauré comme point de vue que la Terre était le centre de l'univers et ceux qui n'étaient pas d'accord ont été tués.

    Il y a un peu plus de deux siècles, une fois de plus en Europe, les gens croyaient que l'esclavage était naturel étant donné la " différente nature " des êtres humains avec des caractéristiques de peau différente.

    Les Européens, nous avons à répondre de beaucoup de choses !
    Dans ce siècle-ci, nous nous trouvons face à la croyance que les êtres humains sont naturellement violents. Nous sommes face à la croyance que le bonheur vient avec l'argent. Nous sommes face à la croyance que les individus n'ont pas la possibilité de produire de réels changements.
    Voici les croyances qu'il nous revient de dépasser.

    D’ici cent ans, nos descendants se réuniront sûrement le 2 octobre 2110 pour le deux cent quarante et unième anniversaire de la naissance de Gandhi, et le cent et unième anniversaire de la première Marche Mondiale par la Paix et la Non-violence. Pouvons-nous imaginer leur façon de penser ? Ils verront l'argent dans les musées et ils seront surpris par la quantité de douleur et la violence qu'il a causée. Ils verront des films documentaires sur les guerres et les armes nucléaires et seront incapables de comprendre pourquoi il existait de telles choses. De la même manière que nous ne pouvons pas aujourd'hui comprendre comment on peut maintenir un autre être humain dans l'esclavage.

    Mais nous ne regardons pas en arrière, d’ici 100 ans dans le futur. Nous sommes ici maintenant et avec cette tâche à mener de l’avant.

    Dans Monde sans Guerres, nous venons de souffrir le plus grand changement dans notre histoire relativement brève. Après avoir organisé et complété avec succès la Marche Mondiale, nous avons perdu la lumière qui nous guidait, Silo.  Silo a été pour nous une lumière externe, un point de référence externe. Dès lors, chacun de nous devra être attentif pour détecter aussi à l'intérieur de lui-même cette lumière, qui déjà nous guide et nous sert de référence. C’est bien ce point au-delà de notre horizon temporel, la Nation Humaine Universelle, que nous allons atteindre.
    Merci.

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    Tony Robinson
    Porte-parole international

    Monde sans Guerres et Sans Violence
    tonymrobinson@gmail.com

     

     

    Extraits du parcours dans le monde de la Marche Mondiale pour la Paix et la Non-Violence, et arrivée à Punta de Vacas, Mendoza - Argentine (en 2 parties).

  • MUHAMMAD YUNUS : ”LE SYSTEME EST AVEUGLE A TOUTE AUTRE CONSIDERATION QUE LE PROFIT”

    LE MONDE 2 | 25.04.08 | 11h19 • Mis à jour le 25.04.08 | 14h51

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    REUTERS/RAFIQUR RAHMAN

    Depuis plus de trente ans, Muhammad Yunus propose, avec un réel succès, l'accès au crédit pour les plus démunis. A l'heure de la crise du système bancaire et des émeutes de la faim, l'économiste bangladais, Prix Nobel de la paix en 2006, pointe les limites et les failles du capitalisme, et préconise un modèle d'entreprise sociale, qui n'exclurait plus de la vie économique la majeure partie de l'humanité.

    Elle s'appelait Sufiya Begum. Au début des années 1980, elle vivait dans une maison de terre, à la campagne, au Bangladesh. Elle fabriquait de jolis tabourets en bambou. Son mari, journalier, gagnait l'équivalent de quelques centimes d'euros par jour. Ne possédant pas 'argent, Sufiya Begum vendait tous ses tabourets à un commerçant, qui les lui échangeait contre 25 cents et un peu de bambou – c'était son prix. Un jour, Muhammad Yunus vient la trouver, étonné qu'elle gagne si peu. A cette époque, après des études économiques aux Etats-Unis, le professeur Yunus doute.

    En 1974-1975, le Bangladesh a été ravagé par une terrible famine, et, raconte-t-il, il trouvait alors " de plus en plus difficile d'enseigner d'élégantes théories économiques sur le fonctionnement supposé parfait des marchés libres, tandis que la mort ravageait [son] pays.". Il décide d'agir, bien déterminé à endiguer la pauvreté dans la région de Jobra. Il ne comprend pas pourquoi elle est endémique. En discutant avec Sufiya Begum, il réalise ce qu'il se passe. "Cette femme était étranglée par son prêteur. Il la condamnait à une sorte d'esclavage. Elle lui donnait toute sa collection de tabourets pour 25 cents, juste parce qu'elle ne pouvait acheter le bambou. Il lui manquait un crédit. J'ai mené une enquête. Quarante-deux villageois dépendaient des prêteurs. Tous auraient pu vivre de leur activité, avec un petit investissement. Il leur fallait, en tout, 27 dollars. Je les avais en poche… " Les idées fondatrices de la Grameen Bank et du microcrédit sont nées de ces rencontres.

    Aujourd'hui, après vingt-cinq ans d'existence, la Grameen Bank et les institutions de microcrédit à travers le monde ont aidé à sortir de la pauvreté 150 millions de personnes. Le professeur Yunus a obtenu, avec la Grameen Bank, le prix Nobel de la paix en 2006. Depuis plusieurs années, il développe une nouvelle initiative : l'" entreprise sociale ". Il s'agit de lancer des activités économiques rentables mais dont l'objectif est d'apporter un bénéfice social aux exclus du monde économique. Ainsi a-t-il créé au Bangladesh, avec Franck Riboud, le PDG de Danone, la société Grameen Danone Foods qui vend aux habitants de Bogra des yaourts frais à bas prix, qu'ils voudraient servir dans des coques comestibles – et vitaminées. L'initiative permet de lutter contre la malnutrition et les carences alimentaires et d'offrir des emplois locaux. Si elle fonctionne, elle sera étendue à tout le pays. " Ce genre de petite entreprise sociale pourrait se généraliser, explique le professeur Yunus. Elle ouvre un nouveau type de marché, attentif à la pauvreté et aux besoins réels, qui va peut-être changer nos fondamentaux économiques. "

    Nous avons rencontré Muhammad Yunus à Paris, alors que le système mondial du crédit traverse une crise historique et que plusieurs grandes banques se sont effondrées. La peur de la récession gagne les Etats-Unis et des dizaines de milliers d'Américains se retrouvent poussés à la rue par les organismes prêteurs. Qu'en pense le fondateur de la Grameen Bank, où les taux de remboursement dépassent les 95 % ?

    Comment expliquez-vous cette gigantesque crise du crédit populaire qui ébranle l'ensemble du système financier ? L'avez-vous vu venir ?

    Dans l'affaire des subprimes, la crise est inhérente au fonctionnement du monde financier et bancaire. Les principes mêmes de crédit, les garanties exigées, les primes de risque réalisées sur le dos des moins solvables ont révélé combien ce système ne sait pas prêter aux pauvres. La faute revient donc d'abord aux banques. Elles ont prêté beaucoup d'argent en multipliant les fausses promesses. Elles se sont montrées très agressives dans leur publicité. Elles proposaient aux gens des offres fantastiques, assuraient que les plus modestes pourraient rembourser sur la durée.

    En fait, les crédits devenaient de plus en plus lourds. C'est la logique du système financier. Les pauvres doivent être mis sous pression pour rembourser. A la Grameen Bank, nous faisons l'inverse. Nous ne demandons pas de garantie pour prêter de l'argent. Nous n'étranglons pas les gens en pratiquant des taux exorbitants. Nous avons inversé le principe même du crédit. Chez nous, moins vous avez, plus vous nous intéressez. Si vous n'avez rien, alors vous êtes prioritaires. Et ça marche ! Notre taux de remboursement est supérieur à 95 %, comparez !

    Les subprimes, les dettes transformées en produits financiers, l'aveuglement face à la situation des ménages les plus pauvres : comment en sommes-nous arrivés-là ?

    Le système financier cherche toujours le meilleur rendement, il est emporté par sa propre logique, les subprimes, les titres, les hedge funds… La seule voix qui se fait entendre sur le marché est la maximisation des profits. La vente des crédits consentis en titres financiers et créances hypothécaires, la création et les échanges d'actifs bancaires sans solvabilité ont accéléré la crise.

    De grandes banques, de grandes sociétés les ont utilisés pour se couvrir à l'heure des bilans. Le système est aveugle à toute autre considération que le profit. Aujourd'hui, les médias font leurs gros titres sur les sommes colossales perdues par les banques, tout cet argent dilapidé, ces patrons démis de leurs fonctions… Mais j'entends très peu parler des familles qui ont été dupées par les offres inadaptées des banques, qui se retrouvent poussées à la rue, poursuivies par les créanciers, ces centaines de milliers de gens qui les ont crues.

    Vous remettez en cause le principe même de l'octroi du crédit sous garantie, fondement de la théorie économique classique et du fonctionnement financier…

    En effet, je critique le dogme selon lequel des prêts ne peuvent être accordés sans garantie, surtout aux plus pauvres. Tous les banquiers défendent ce principe sans même l'analyser. Quand nous avons commencé, en 1983, ils nous disaient : " Vous gaspillez votre argent. Vous ne serez jamais remboursé. Votre système va s'écrouler. " Mais c'est leur système qui s'écroule aujourd'hui. Depuis vingt-cinq ans, la Grameen Bank et les institutions du microcrédit ont distribué 6 milliards de dollars à 150 millions de familles, sans demander de garantie. Notre banque réalise des profits, comme toute banque bien gérée. Elle n'a pas eu recours à des dons depuis 1995. Elle fonctionne en collaboration avec 10 000 institutions de crédit dans le monde. Selon une enquête récente, 64 % de ceux qui nous ont emprunté pendant cinq ans sont sortis de la pauvreté chronique. Notre initiative constitue une opportunité pour ajuster l'ensemble du système financier. Il devrait permettre de penser un nouveau genre de crédit qui ne laisse personne de côté.Les principes actuels du système bancaire interdisent à la moitié de la population mondiale de participer à la vie économique. Pas seulement dans les pays du Sud, mais aux Etats-Unis et en Europe aussi. Les banques traditionnelles demandent aux gens d'être solvables avant même de leur prêter de l'argent. Mais alors à quoi servent-elles, si elles ne les aident pas à sortir d'une situation difficile, à créer de la valeur, du travail ? Les banques demandent tous les jours à leurs avocats de coincer leurs clients. Nous n'avons pas de juristes dans notre système. Nous n'en avons pas besoin. On mesure combien la théorie économique dominante présente plusieurs angles morts.

    Lesquels vous semblent-ils les plus dangereux ?

    Les banques et les financiers refusent d'entendre que prêter aux pauvres permet de créer des emplois et de générer des revenus. Ils ne reconnaissent pas une famille ou un ménage comme une unité de production dynamique. Ils ne voient pas qu'une activité indépendante – échoppe de rue, service de réparation, barbier, retoucheur, petit artisan itinérant, tout ce qu'on appelle le "secteur informel " – constitue un véritable travail, et même une source d'emploi qui doit être encouragée par le crédit. La littérature économique fait l'impasse sur cette donnée majeure de l'activité humaine, le travail indépendant, qui est le premier moyen de gagner sa vie. Les responsables économiques considèrent l'emploi comme salarié uniquement, ils attendent des entreprises qu'elles embauchent. Si elles ne le font pas, le chômage s'installe. Voilà la logique actuelle du capitalisme. Pourquoi les gens devraient-ils attendre d'être employés ? Pourquoi ne pas les aider à créer leur propre activité ? Les pauvres du Sud n'attendent pas que des grandes entreprises les rémunèrent. Ils n'espèrent pas tout de la politique d'emploi et des allocations-chômage. Ils doivent nourrir leur famille, ils font une multitude de travaux utiles, petit commerce, service de réparation, tailleur… Regardez l'intense activité qui règne dans les rues des villes asiatiques les plus pauvres, et comparez avec les vôtres ! Il faut soutenir cette énergie avec le crédit populaire, lui donner des outils économiques…

    Vous dites qu'en Europe et aux Etats-Unis, nous sommes enfermés dans une politique d'emploi et de crédit élitaire et étriquée. Expliquez-nous…

    Récemment, un ami américain me racontait qu'il avait traversé les régions pauvres des Etats-Unis, les villes frappées par les licenciements et le chômage. Il décrivait des quartiers déserts, des rues mortes, des maisons inoccupées, des bureaux et des usines fermées, partout. Il se demandait comment les habitants parvenaient à survivre. Voilà à quoi mène la logique du travail salarié, la politique de l'emploi unique. Quand cet ami a visité le Bangladesh, infiniment plus pauvre que les Etats-Unis, il a découvert combien n'importe quel coin du pays, à la ville, la campagne, grouille d'activités " informelles ". Sur la moindre parcelle inoccupée, on trouve des cabanes où l'on vend de tout, des légumes, des outils, de l'électronique… Dans pratiquement toutes les maisons, les cours, les jardins, les gens trient leur récolte, fabriquent, soudent, réparent. Dans l'Occident riche, vous ne proposez qu'un seul type d'emploi, salarié, pour un patron, une entreprise. Entendez-moi bien : je soutiens toute forme d'embauche et d'industrie, toute politique de l'emploi. Mais ne promouvoir que le salariat me semble terriblement limité. Voir seulement l'homme comme un être recherchant une paie me semble une conception étroite de l'humain. C'est une forme d'esclavage.

    D'esclavage ?

    Aujourd'hui, dans les pays du Nord, chaque enfant travaille dur à l'école pour obtenir un bon travail. C'est-à-dire un bon salaire. Adulte, il travaillera pour quelqu'un, deviendra dépendant de lui.

    L'être humain n'est pas né pour servir un autre être humain. Un travailleur indépendant, qui tient une échoppe par exemple, travaille quand il en a besoin. Si certains jours il ne veut pastravailler, il le peut. Il a fait sa journée, il profite un peu de la vie. Il n'a personne à prévenir s'il a une heure de retard. Il ne s'inquiète pas de perdre une partie de son salaire. Quand nous étions des chasseurs-cueilleurs, nous n'étions pas des esclaves, nous dirigions nos existences. Des millions d'années plus tard, nous avons perdu cette liberté. Nous menons des vies rigides, calées sur les mêmes rythmes de travail tous les jours. Nous courons pour nous rendre au travail, nous courons pour rentrer à la maison. Cette vie robotique ne me semble pas un progrès. Avec le salariat, nous avons glissé de la liberté d'entreprendre et d'une certaine souplesse de vie vers plus de rigidité. J'ai un salaire, un patron, je dois faire mon job que cela me plaise ou non, car je suis une machine à sous. C'est là le danger global des structures économiques actuelles, de la théorie dominante. L'homme est considéré comme un seul agent économique, un employé, un salarié, une machine. C'est une vision unidimensionnelle de l'humain. Le salariat devrait rester un choix, une option parmi d'autres possibilités.

    Le " secteur informel " n'a pas bonne réputation dans la littérature économique des pays riches…

    C'est un terme dégradant. Ce secteur n'est jamais encouragé ; au contraire, on l'entrave avec des règlements, des patentes, des impôts. Je suggère de lui donner un nom plus adapté, plus valorisant, car c'est justement là que les hommes se montrent le plus créatifs. Faute de mieux, je propose le " secteur des gens ", c'est-à-dire lorsqu'ils inventent eux-mêmes leur emploi, créent leur activité et la pratiquent dans la rue, les quartiers, à la campagne. Dans ce champ d'activité, la population invente son emploi, le pratique un peu partout, dans la rue, dans les quartiers, à la campagne. Le gouvernement n'a rien à y faire, seulement à veiller de ne pas l'étouffer. Je fabrique des bijoux, je grille des noix et des bonbons, je fais la cuisine pour les gens du quartier, je retouche les habits usés, je chante aux terrasses… C'est l'auto-emploi, le self-employement. Je n'ai pas à remplir un formulaire de candidature. Je n'attends pas d'être embauché. Je réponds directement à la demande. En inventant mon activité, je prends soin de moi-même et de ma famille. Des dizaines de millions de personnes vivent ainsi dans les pays en voie de développement. Dans les pays riches, la théorie dominante ne considère pas ces activités comme " économiques ". Les acteurs sociaux, les banques, se refusent à les financer et les aider. Ils croient seulement à l'entreprise formelle, au salariat. Comme si recevoir un salaire vous donnait le certificat de développement !

    Quels autres " angles morts " de la pensée économique révèlent la crise actuelle ?

    Les gouvernements qui tiennent les leviers et les banques considèrent la personne humaine comme une entité abstraite, un agent économique dépourvu de genre sexuel. Or, notre expérience à la Grameen Bank révèle que les femmes se montrent beaucoup plus actives et solvables que les hommes dès qu'on leur donne du crédit. Au Bangladesh, quand j'essayais en vain de convaincre les banques d'octroyer des prêts aux villageois, on me répondait toujours : " C'est impossible de faire ça. " Quand j'ai émis l'idée de prêter aux femmes pauvres, on m'a considéré comme un illuminé. Quand on parlait d'argent aux femmes, elles répondaient toutes : " Voyez mon mari. Je ne touche jamais à l'argent. Je n'y connais rien. " Je me suis rendu compte qu'aucune femme, pas même 1 % d'entre elles, ne fréquentait les banques. Elles ont été tellement sous-estimées que je me disais : elles ont peur, cela va prendre du temps. Quand n